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Point Macro-économique avec François Duhen - 3ème trimestre 2022

Le 3e trimestre a été marqué par l’accélération du resserrement monétaire des banques centrales, lesquelles sont résolues à se consacrer à leur objectif de lutte contre l’inflation et ont, via leur communication, amplifié le rebond très net des taux souverains américains et européens. Dans ce contexte, et après un vif rebond en début d’été, les marchés d’actions ont subi une forte correction. Si les pressions inflationnistes se sont renforcées, la croissance économique marque le pas également, notamment en Europe du fait des crises inflationniste et énergétique. Celles-ci ont été exacerbées par l’arrêt de l’approvisionnement en gaz via Nord Stream 1 au cours de l’été et l’envolée de son prix et de celui de l’électricité. En réponse, les Etats européens ont accru leur soutien aux ménages et aux entreprises. Toutefois, l’ampleur des dépenses publiques au Royaume-Uni souhaitées par Liz Truss a alimenté les craintes des investisseurs en fin de trimestre.

En zone euro, l’accélération de l’inflation au cours du trimestre a contraint la Banque centrale européenne (BCE) à remonter ses taux directeurs de 50 pb en juillet et 75 pb en septembre, tout en indiquant que d’autres hausses seraient à venir lors des prochaines réunions. Ceci a alimenté le net rebond des taux souverains et le plongeon des indices actions (-5% pour le Stoxx Europe 600 mais -13% depuis le pic de la mi-août), malgré le fait que les perspectives économiques se sont dégradées comme en ont témoigné la contraction des indices d’activité PMI (notons toutefois la bonne surprise du PIB au T2 du fait notamment du tourisme). Le risque de désancrage des anticipation d’inflation est jugé plus prégnant, d’autant que l’arrêt de l’approvisionnement en gaz russe via Nord Stream 1 a provoqué une hausse très marquée du cours du gaz et par ricochet de l’électricité. Ceci a conduit la Commission européenne à amplifier ses travaux pour réduire les tensions sur les prix et surtout donner les moyens aux Etats de soutenir les ménages et les entreprises (notamment via la taxation des revenus de certains producteurs énergétiques), mais une partie doit encore faire l’objet d’un consensus. A l’échelle des Etats, les stocks de gaz ont été reconstitués et des mesures budgétaires substantielles ont été prises pour mieux protéger les ménages et les entreprises, à l’image des annonces allemandes. Toutefois, la question énergétique et la récession qui se profile en conséquence ont continué de pénaliser l’euro. Du reste, en amont de l’élection italienne, qui a conduit à la victoire d’une coalition de droite, la BCE a souhaité réduire le risque de fragmentation financière. En juillet elle adoptait ainsi le dispositif (TPI) lui permettant, sous certaines conditions et en dernier recours, de procéder à des achats ciblés et illimités de dette.

En France, l’activité a bénéficié du rebond du tourisme cet été mais le pouvoir d’achat a continué de pâtir de l’accélération de l’inflation. Le gouvernement a renforcé son soutien, notamment via un plan de soutien de l’ordre de 45 MM€, comprenant la prolongation partielle du bouclier tarifaire sur les prix du gaz et de l’électricité en 2023 (hausse limitée à +15%).

Au Royaume-Uni, la nouvelle Première ministre Liz Truss a annoncé un vaste plan budgétaire, visant à la fois à limiter la hausse de la facture énergétique et à réduire la fiscalité. Financé par endettement, il a provoqué une envolée des taux souverains et un décrochage de la livre sterling. Face au risque d’instabilité financière, la Banque d’Angleterre, qui avait relevé ses taux directeurs de 50 pb en août et en septembre et annoncé en faire plus, a dû intervenir en urgence via des achats de dettes de long terme pour détendre les tensions fortes sur les marchés financiers.

Aux Etats Unis, le risque d’atterrissage brutal de la croissance a d’abord été craint avant que les indicateurs d’activité et de l’emploi ne rassurent. Les taux souverains sont ainsi nettement repartis à la hausse, ce qui s’explique aussi par l’action de la Fed (en particulier la communication de son président à Jackson Hole). Le message martelé a été clair : poursuivre le chemin des hausses de taux directeurs vers une politique monétaire restrictive et les maintenir à ce niveau afin de calmer dans la durée l’inflation et d’ancrer les anticipations (les dernières données sont rassurantes sur ce point). Face à une inflation qui commence à montrer des signes rassurants, mais bien trop lentement, la Fed est restée « agressive », cette dernière ayant relevé sa fourchette de taux directeurs de 75 pb à deux reprises (à 3%-3,25%). Dans le sillage des valeurs technologiques, le S&P500 a alors abandonné 17% par rapport à son pic (et 5% sur le trimestre). Le dollar en a quant à lui bénéficié, porté également par le regain d’aversion au risque dans le monde. Par ailleurs, le gouvernement de J. Biden a adopté des mesures de soutien à l’économie, dont l’ampleur est moindre qu’en 2020.

En Chine, outre le regain de tensions géopolitiques avec Taïwan, l’activité est restée pénalisée par les restrictions sanitaires et dans une moindre mesure la crise du secteur immobilier et des facteurs climatiques. Si les autorités ont accru leur soutien budgétaire et monétaire (la banque centrale a modérément baissé ses taux à deux reprises), l’activité économique et la confiance sont restées affaiblies. S’agissant des pays émergents, la détente des prix des matières premières a contribué à un ralentissement des pressions inflationnistes, concomitant au resserrement monétaire de leurs banques centrales.

S’agissant des matières premières, les cours du pétrole se sont largement repliés, sous le seuil 90 $/baril en raison des craintes de récession mondiale. Le cours du gaz en Europe a atteint un point haut historique en août, au-dessus de 340 €/MWh, à l’annonce de l’arrêt des flux transitant par le gazoduc Nord Stream 1, avant de redescendre aux alentours de 200 €/MWh. De manière générale, une détente des indices des prix des matières premières est observable.

Achevé de rédiger le 6 octobre 2022