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Point Macro-économique avec François Duhen - octobre 2022

Le mois d’octobre a été marqué par la poursuite du resserrement monétaire de la Banque centrale européenne (BCE) afin de lutter contre l’inflation qui continue d’accélérer et pénalise de manière croissante les économies européennes. Néanmoins, en raison d’une communication un cran moins agressive de la part des banquiers centraux, en Europe comme aux Etats-Unis, les investisseurs financiers ont réduit leurs attentes en matière de resserrement monétaire faisant chuter les taux souverains à la fin du mois. Du reste, les tensions qui avaient un temps frappé le marché obligataire britannique se sont apaisées à la suite de la démission de la Première ministre, Liz Truss, et de la révision du plan budgétaire initialement annoncé. Enfin, le Congrès du Parti communiste a renforcé l’emprise du président Xi Jinping sur le pouvoir et confirme les axes de sa politique, notamment sanitaire.

En zone euro, l’accélération de l’inflation a contraint la BCE à relever une nouvelle fois ses taux directeurs de 75 pb lors de sa réunion de politique monétaire. Si C. Lagarde a rappelé la nécessité de poursuivre les hausses de taux directeurs, elle a déclaré que le rythme de leur relèvement dépendrait également de l’analyse des conséquences des mesures prises jusqu’ici alors que le contexte économique se dégrade déjà rapidement. De plus, afin de renforcer le caractère de plus en plus restrictif de sa politique monétaire, la BCE a rétroactivement durci les conditions des opérations de financement bon marché TLTRO pour les banques (2100 MM€) afin de les inciter à rembourser leurs prêts de manière anticipée. Par ailleurs, malgré la saison touristique, les premières estimations des PIB ont indiqué un ralentissement de l’activité au 3e trimestre (+0,2% en glissement trimestriel) mais les indicateurs PMI pointent déjà vers une contraction et cette tendance s’est accélérée en octobre (47,3 vs 48,1 en septembre, 50 étant le seuil de contraction). Face à la crise énergétique, les Etats européens ont de nouveau tenté, lors du Conseil européen, de s’accorder sur un corpus de mesures visant à limiter la hausse des prix énergétiques. Celles-ci (ex. achat commun de gaz, encadrement du prix de gros du gaz) ont fait l’objet d’une feuille de route mais les divergences au sein des Etats-membres restent profondes.

En France, la croissance a également ralenti au T3 en raison de la stagnation de la consommation et de la contraction du commerce extérieur. Pour limiter l’impact de l’inflation, le gouvernement a annoncé l’instauration d’un dispositif d’aides (12 MM€) aux entreprises et aux collectivités visant à réduire leur facture énergétique. L’adoption de ces mesures est toutefois compliquée à l’Assemblée nationale à l’instar de l’opposition parlementaire dans les débats sur les projets de lois de finances et de financement de la Sécurité sociale 2023, ce qui a conduit le gouvernement à recourir à l’article 49.3 de la Constitution pour accélérer leurs examens.

Au Royaume-Uni, face au constat qu’elle ne pourra pas mettre en œuvre le programme économique souhaité et à la perte de crédibilité engendrée, la Première ministre, L. Truss, a démissionné et été remplacée par l’ancien ministre des Finances de Boris Johnson, R. Sunak, sur désignation du Parti conservateur. Son départ a contribué à une très nette détente sur les marchés obligataires après un épisode de crise à l’annonce d’un vaste plan budgétaire non financé, qui avait contraint la Banque d’Angleterre à intervenir temporairement en urgence (émergence temporaire du risque de faillite systémique des fonds de pensions britanniques). En amont de la présentation de la nouvelle proposition budgétaire le 17 novembre, le gouvernement de R. Sunak a déjà évoqué une forte réduction des allégements fiscaux et du soutien aux ménages et aux entreprises face à la crise énergétique.

Aux Etats-Unis, si l’estimation préliminaire du PIB au T3 témoigne d’un rebond de l’activité (+2,6% en glissement trimestriel), le détail des composantes signale une dégradation en cours des perspectives économiques. Alors que les données d’inflation de septembre se sont stabilisées sur des points historiquement élevés, les débats relatifs au taux terminal (à partir duquel la Fed arrêtera les hausses de taux directeurs) se sont intensifiés avec d’une part, la nécessité de lutter contre l’inflation et les effets de second tour liés aux tensions sur le marché de l’emploi et, d’autre part, le risque accru de provoquer une récession profonde. Les taux souverains à 10 ans se sont légèrement repliés après avoir atteint un pic (à 4,3%) tandis que l’inversion de la courbe des taux (10 ans-2 ans) s’est poursuivie. En amont de la réunion début novembre, les membres de la Fed ont néanmoins souligné la nécessité de continuer le resserrement monétaire.

En Chine, à l’issue du Congrès national du Parti communiste, la désignation du nouveau bureau central chinois a confirmé la volonté du président Xi Jinping de resserrer son emprise sur le pouvoir. Dans la continuité du précédent quinquennat, les axes de sa politique, apparaissent renforcés, y compris sur le front sanitaire (politique « zéro-Covid » non ajustée). Si la croissance chinoise a rebondi au T3 (+3,9% en glissement trimestriel), les signes de fragilité de l’économie chinoise restent substantiels compte tenu du renforcement des contraintes sanitaires (ex. à Shanghai), de la faiblesse de la consommation et du commerce mondial (indices d’activité PMI sous 50). S’agissant des pays émergents, l’ancien président Lula a été élu au second tour des élections présidentielles au Brésil face à J. Bolsonaro, le président sortant. La faible avance de Lula et son absence de majorité au Congrès réduisent sa capacité à mettre en œuvre la totalité de son programme économique et budgétaire.

S’agissant des matières premières, les cours du pétrole sont restés volatils, oscillant entre 90 et 95 $/b en raison des craintes relatives à la baisse de la demande mondiale et les réductions de la production de l’OPEP. En raison de températures d’octobre anormalement élevées et de stocks européens de gaz remplis, le cours du gaz en Europe se sont effondrés atteignant un point bas de 4 mois, inférieur à 100 €/MWh, avant de rebondir légèrement à la fin du mois.

Achevé de rédiger le 14 novembre 2022