RECHERCHEZ UN FONDS

De part et d’autre de l’Atlantique, le début d’année aura été marqué par l’abandon de l’idée que les banques centrales allaient baisser rapidement et dans une ampleur importante leurs taux directeurs. Aux Etats-Unis, malgré l’émergence de signes plus tangibles de ralentissement de l’économie, le rebond de l’inflation, conjugué à un marché du travail encore résilient, ont contribué à la hausse des taux souverains. En zone euro, malgré la rechute notable de l’inflation depuis le début de l’année, la vigueur des prix des services inquiète toujours, incitant les membres de la Banque centrale européenne (BCE) a réitéré leur prudence et tempéré les anticipations de baisse des taux directeurs des investisseurs, ce qui a aussi porté les taux souverains européens, cela d’autant que l’environnement économique commence à s’améliorer. Notons en revanche que les marchés d’actions ont continué de progresser, regardant au travers de cette remontée des taux jugée que temporaire. La Banque du Japon (BoJ) a pour sa part mis un terme à sa politique monétaire ultra-accommandante en relevant les taux directeurs en territoire positif et en abandonnant son contrôle de la courbe des taux, dans le sillage d’une boucle prix-salaire vertueuse favorable à l’atteinte de l’objectif d’inflation. En Chine, la Banque populaire de Chine a assoupli davantage sa politique monétaire dans le but de soutenir le secteur immobilier alors que l’inflation a retrouvé une dynamique positive en février. En outre, le trimestre a été marqué par l’aggravation du risque géopolitique soutenant ainsi le prix des matières premières, à l’image de la remontée sensible du cours du pétrole.

En zone euro, alors que l’économie européenne a évité la récession au 4ème trimestre 2023, des signes d’amélioration se sont matérialisés au 1er trimestre, à l’instar du rebond des indices PMI, notamment dans les services lesquels évoluent désormais en territoire d’expansion depuis le mois de février (une première depuis l’été 2023). Le secteur manufacturier connait également une amélioration très progressive des perspectives, y compris en Allemagne, bien que les indices PMI soit toujours en territoire de contraction. Ceci a soutenu l’ensemble des taux souverains européens depuis le début d’année (près de 45 pb sur le trimestre pour l’Allemagne à 10 ans et un peu plus de 25 pb à 2 ans). Malgré cette embellie des perspectives économiques, les investisseurs et la BCE tablent toujours sur des baisses de taux directeurs en 2024 dans le sillage de signaux rassurants sur le front des prix avec la rechute rapide de l’inflation aussi bien sur la partie totale que sous-jacente (respectivement +2,4% en glissement annuel en mars vs +2,8% en janvier et +2,9% en mars vs + 3,3% en janvier). Toutefois, les prix des services ne suivent pas cette tendance et ne faiblissent pas (stables à + 4% en rythme annuel en mars) lesquels restent entretenus par la dynamique salariale. Si la BCE a laissé sa politique monétaire inchangée à l’issue des deux dernières réunions, la majorité des membres s’est montrée confiante quant au retour de l’inflation vers sa cible de 2% dans le sillage de la détente progressive du marché du travail qui devrait aboutir à une hausse moins rapide des rémunérations (la BCE a explicitement évoqué la nécessité d’attendre le résultat des négociations salariales du printemps avant de baisser les taux). Durant le premier trimestre, la BCE a également présenté la révision du cadre opérationnel de sa politique monétaire. L’écart entre le taux de refinancement et celui de rémunération des dépôts (qui sert actuellement de « plancher ») sera réduit (de 50 à 15 pb), ce qui permettra à la BCE de disposer de davantage de flexibilité dans la normalisation de son bilan. Ainsi, le Stoxx Europe 600 a continué de progresser au premier trimestre (+7%), dans un regain d’intérêt pour les actifs risqués qui a aussi vu le resserrement du spread entre l’Allemagne et l’Italie à 10 ans (-25 pb à 140 pb) dans le sillage d’une forte demande pour les bons du trésor italien et d’une dynamique économique plus favorable dans le pays.

Aux Etats-Unis, si le début d’année a été marqué par une vague d’optimisme quant à des baisses de taux directeurs multiples et rapides, les statistiques d’inflation moins bien orientées en janvier et février et la résilience de l’économie ont conduit les investisseurs à ajuster leurs attentes, contribuant à la remontée sensible des taux souverains américains sur le trimestre (10 ans : +45 pb à 4,33%). Ceci n’a toutefois pas empêché le S&P 500 de progresser (+9,9%) et de surperformer son homologue européen (Stoxx Europe 600 : +6,5%). Le 1er trimestre a été marqué par des statistiques encore bien orientées sur le front de l’emploi américain notamment, mais un début de tassement de la conjoncture est à l’œuvre (recul des ventes au détail et de la confiance des consommateurs). Dans ce contexte, la Fed a maintenu sa fourchette cible de taux directeurs à 5,25-5,5% au 1er trimestre alors que les débats concernant l’assouplissement monétaire à venir s’intensifient entre ses membres. Ces derniers ont par ailleurs révisé à la hausse leur prévision de croissance et d’inflation sous-jacente en 2024 mais anticipent toujours trois baisses de taux directeurs cette année selon les « dots » (i.e. prévisions des membres pour les taux directeurs à fin d’année). Si le président de la Fed, J. Powell s’est pour sa part montré confiant dans le retour durable de l’inflation vers sa cible estimant opportune une baisse des taux directeurs cette année, celui-ci n’a cessé de réitérer la nécessité pour la Fed de conserver une approche data dependent. L’inflation sous-jacente, qui peine à ralentir davantage, demeure l’enjeu pour la Fed qui a besoin de signes plus tangibles de son recul durable pour agir. En outre, le Congrès a voté l’ensemble des 12 lois d’appropriations qui constituent le budget fédéral pour 2024, qui a été promulgué par J. Biden en mars. Ceci dissipe le risque de tout nouveau shutdown (i.e. arrêt des services non essentiels de l’Etat fédéral) jusqu’à la fin de l’année fiscale 2024 (en septembre). Les marchés d’actions ont pour leur part totalement regardé au travers des diverses perturbations à court terme, celles-ci n’étant jugées que temporaires, en se projetant ainsi avec optimisme sur la rechute des taux attendue en deuxième partie d’année (progression de +11% pour le S&P 500 sur le trimestre).

En France, alors que l’inflation a poursuivi sa décrue sur le 1er trimestre, s’établissant à +2,3% en glissement annuel en mars, les perspectives de la croissance en 2024 ont été révisé à la baisse par le gouvernement (+1% en 2024 vs +1,4% précédemment) à l’instar des autres institutions françaises (Banque de France et l’Insee). Les derniers indicateurs PMI plaident toutefois pour un début de reprise de l’activité en France, y compris dans l’industrie. En outre, le déficit budgétaire français a largement dépassé la cible du gouvernement selon l’Insee atteignant 5,5% du PIB en 2023 contre 4,9% attendu par le ministère des Finances). Face à ce dérapage et dans un contexte de remontée des taux souverains, des coupes budgétaires supplémentaires à hauteur de 10 MM€ ont été annoncées.

Au Royaume-Uni, la Banque d’Angleterre (BoE) a envoyé un signal un cran plus favorable indiquant que le démarrage de la phase d’assouplissement monétaire était proche. L’inflation britannique a nettement rechuté en début d’année tout en restant sur des niveaux encore élevés (+3,4% en glissement annuel en février pour l’inflation totale et +4,5% pour la partie sous-jacente) tandis que les pressions salariales ont également reflué, bien que toujours hautes. Si l’augmentation des rémunérations reste sujette à des révisions méthodologiques, celle-ci croît encore à un rythme bien supérieur à l’inflation (+6,1% en glissement annuel) offrant des gains de pouvoir d’achat sensibles au ménages. Ainsi, les perspectives économiques tendent à s’améliorer au 1er trimestre 2024, les indices PMI évoluant à nouveau en territoire d’expansion depuis le début d’année.

En Chine, les signaux sur le front économique sont plus favorables depuis le début d’année. Du côté des prix, l’inflation est repassée en territoire positif en février après cinq mois de déflation tandis que les indices PMI se sont légèrement améliorés notamment dans le secteur manufacturier lequel repasse en territoire d’expansion en mars. Les autorités chinoises ont réitéré leur volonté de soutenir la croissance à l’aide de mesures budgétaires et monétaires. De nouvelles annonces d’assouplissement monétaire ont eu lieu et l’action de la banque centrale devrait soutenir le crédit au fil des prochains mois. Les différentes annonces de soutien ont ainsi permis aux indices chinois de sortir de leur spirale baissière, lesquels restent toutefois parmi les moins performants depuis le début de l’année (Hang Seng : -1,9%).

Au Japon, lors de sa réunion de mars, la banque du Japon (BoJ) a relevé son taux directeur de 20 pb (à 0,1%) sortant ainsi de l’ère des taux négatifs. La banque centrale a considéré que son objectif d’inflation (2%) était désormais atteignable notamment face au constat d’une boucle inflation-salaire vertueuse. Les négociations salariales ont en effet débouché sur des hausses significatives (supérieures à +5%). Ceci n’a toutefois pas empêcher le yen de poursuivre sa dépréciation tendancielle (-6,8% face au dollar depuis le début de l’année).

Enfin, s’agissant des matières premières, le cours du Brent a connu un rebond marqué depuis le début d’année (+16%) lequel a retrouvé ses points hauts depuis octobre 2023 proche de 90 $/b. Si l’annonce début mars de l’OPEP concernant la prolongation des coupes de production jusqu’à la fin du 2ème trimestre a pu soutenir le cours du pétrole, sa hausse est surtout liée aux tensions géopolitiques toujours croissantes (tensions en mer Rouge et entre l’Iran et Israël, frappes ukrainiennes sur les installations pétrolières russes). Pour sa part, le cours du gaz européen (Dutch TTF) a nettement chuté passant sous le seuil de 30 €/MWh (à 26 €/MWh, dans le sillage d’un meilleur équilibre entre l’offre et la demande.

Achevé de rédiger le 15 mars 2024