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Point Macro-économique par François DUHEN, Chef économiste et Stratégiste CIC Market Solutions - Septembre 2023

Le mois de septembre a été marqué par les réunion des banques centrales, lesquelles ont parfois réservé des surprises, et la poursuite de la hausse des taux souverains de part et d’autre de l’Atlantique. Si la Fed a décidé de maintenir ses taux directeurs à leurs niveaux actuels, les investisseurs financiers ont retenu la résilience de l’économie américaine, les déclarations et les prévisions des membres de la Fed favorables à une poursuite du resserrement monétaire, ce qui a contribué à la hausse substantielle des taux de longue échéance. En particulier aux Etats-Unis où les taux ont atteint des points hauts depuis 2007, alimentant également l’appréciation du dollar. En zone euro, la BCE a surpris une partie des investisseurs en relevant ses taux directeurs de 25 points de base (à 4% pour le taux de facilité de dépôt et 4,5% pour le taux de refinancement) et les taux souverains européens, dans le sillage de leurs pairs américains, se sont largement appréciés. En Chine, l’activité économique s’est modestement améliorée, portée par les mesures de soutien prises par l’Etat chinois au cours de l’été. Enfin, les cours du pétrole ont largement crû au-delà du seuil de 90 $ le baril en raison des tensions sur la demande et sur l’offre (prolongement des coupes de production de l’OPEP et réduction des exportations russes).

En zone euro, la Banque centrale européenne (BCE) a relevé ses taux directeurs de 25 points de base (pb) en septembre (à 4,5% pour le taux de refinancement, soit un point haut depuis 2001) dans une décision inattendue par nombre d’investisseurs, tout en accompagnant cette hausse d’un ton bien plus prudent quant à la suite du resserrement monétaire. La BCE a justifié ce relèvement par une trajectoire d’inflation toujours au-dessus de sa cible pendant encore de longs mois (la cible d’inflation à 2% n’étant pas atteinte avant le T1-2025 selon son scénario). Ce relèvement n’était pas consensuel au sein du conseil des gouverneurs selon les propos de C. Lagarde. Néanmoins, les taux souverains européens ont poursuivi leur hausse au cours du mois (Allemagne à 10 ans : +30 pb ; à 2 ans : +15 pb), portés par un discours offensif de la part de plusieurs banquiers centraux ayant évoqué la possibilité d’une nouvelle hausse des taux directeurs d’ici la fin de l’année. Pourtant, les premières estimations d’inflation ont indiqué la poursuite du ralentissement de l’inflation en septembre, et ce, malgré le rebond des prix du pétrole. L'inflation sous-jacente a ralenti (+4,5% en glissement annuel vs +5,3% en août) tout comme l'inflation générale (+4,3% vs +5,2% en août). De plus, les différents indicateurs d’activité, à l’instar des indices PMI de septembre toujours en territoire de contraction, ont témoigné du ralentissement en cours de l’économie, en particulier dans l’industrie. Aussi, la croissance économique de la zone euro a-t-elle été révisée à la baisse au T2-2023 en 3ème estimation (+0,1% en variation séquentielle vs +0,3% en 2ème estimation et +0,1% au T1). Soulignons, en Espagne, l’échec d’Alberto Nunez Feijoo, candidat de la coalition de droite arrivé en tête aux élections générales de juillet, à réunir une majorité lors de deux votes d’investiture et à former un gouvernement.

En France, l’inflation est restée stable en septembre (à +4,9% en glissement annuel) malgré la remontée des prix de l’énergie. L’activité a continué de se dégrader au cours du mois comme peut en témoigner la baisse des indices PMI, tant dans les services que l’industrie, et de la confiance des consommateurs. Du reste, le gouvernement a présenté son projet de budget pour 2024, lequel prévoit une trajectoire de déficit budgétaire de l’ordre de 4,9% du PIB en 2023, 4,4% en 2024 et un retour sous le seuil de 3% en 2027.

Au Royaume-Uni, la Banque d’Angleterre a choisi de maintenir ses taux directeurs inchangés à l’issue de sa réunion de politique monétaire (à 5,25% vs 5,5% attendu par le consensus), une décision qui n’était pas entièrement intégrée par les investisseurs financiers comme l’a confirmé la dépréciation de la livre sterling face aux principales devises à l’issue de la réunion. Cette pause n’était d’ailleurs pas consensuelle au sein des membres (5 « pour » vs 4 en faveur d’une hausse de 25 pb), ce qui souligne l’incertitude au quant à la suite à donner à la politique monétaire. L’inflation britannique a modestement ralenti au mois d’août (+6,7% sur un an vs +6,8% en juillet) en raison de la remontée des prix de l’énergie et l’inflation sous-jacente, hors énergie et alimentation, a ralenti beaucoup plus nettement qu’attendu (à +6,2% en glissement annuel vs +6,8% attendu et +6,9% en juillet). Les données de l’emploi continuent toutefois de témoigner de tensions toujours fortes sur le marché du travail, à l’instar de l’évolution des salaires. Enfin, en juillet, le PIB britannique s’est contracté (-0,5% en glissement mensuel), un repli généralisé à l’ensemble des secteurs.

Aux Etats-Unis, dans une décision largement attendue par les investisseurs, la Fed a maintenu sa fourchette cible des taux directeurs à 5,25%-5,5% mais la révision à la hausse de ses prévisions de croissance et de taux directeurs à moyen et long termes a renforcé l’appréciation des taux souverains (à 10 ans : +50 pb ; à 2 ans : +15 pb) et du dollar (+4% face à l’euro, sous le seuil de 1 € = 1,06 $). Sans surprise, ce mouvement est essentiellement tiré par les taux réels, la référence à 10 ans ayant atteint un sommet depuis 2009, ce qui a pèse sur les actifs risqués et les indices actions en particulier (S&P 500 : - 4,7% ; Stoxx 600 : -2%). Pour les membres de la Fed, le pic des taux directeurs est toujours attendu d’ici fin d’année avec un dernier relèvement (12 des 19 membres sont favorables à une dernière hausse). Si l’institution se félicite de la détente récente observée sur l’inflation et l’emploi, elle juge encore nécessaire de maintenir un ton prudent afin de conserver des conditions financières restrictives. En effet, l’économie présente toujours des signes de résilience (à l’image de l’indice ISM des services en territoire d’expansion), l’inflation a rebondi en août (+3,7% vs +3,2% en juillet), en raison du rebond des prix du pétrole tandis que l’inflation sous-jacente, hors énergie et alimentation, continue de ralentir sur un an (+4,3% vs +4,7% en juillet). Enfin, alors que le Congrès n’avait pas encore adopté de budget à l’approche de la date de clôture de l’exercice fiscal 2023 (30 septembre), une proposition bipartisane de budget provisoire, prolongeant le financement des activités fédérales jusqu’au 17 novembre, a permis d’éviter un shutdown (fermeture des services non essentiels de l’Etat).

En Chine, l’économie chinoise rencontre toujours des difficultés mais l’activité a progressé à la faveur des mesures prises par les autorités au cours de l’été. Les ventes au détail et la production industrielle ont rebondi plus fortement qu’attendu au mois d’août. Les indices PMI officiels témoignent d’une activité un cran plus dynamique en septembre, dans le secteur non manufacturier (51,7 vs 51 en août) et dans l’industrie, dont l’indice est de retour en territoire d’expansion pour la première fois depuis mars 2023 (50,2 vs 49,7 en août). Dans le détail, la bonne dynamique économique est portée par les grandes entreprises, tandis que pour les petites et moyennes entreprises les perspectives restent plus négatives selon l’enquête Caixin. S’agissant des pays émergents, au Brésil, la banque centrale a de nouveau baissé ses taux directeurs de 50 pb à 12,75%, tout en indiquant qu’elle n’accélérerait pas le rythme de réduction de ses taux.

Concernant les matières premières, les cours du pétrole ont largement franchi le seuil de 90 $/baril en raison de la résilience de la demande, de la prolongation des coupes de production de l’OPEP (en particulier de l’Arabie saoudite) et de la décision de la Russie d’interdire les exportations de produits distillés, visant à stabiliser son marché domestique. Les prix des denrées agricoles ont pour leur part décliné d’un cran en août selon l’indice FAO des prix alimentaires.

Achevé de rédiger le 10 octobre 2023